Vitesse de marche du fantassin français


Marche du fantassin français de 1916 lors d’une phase d’assaut


Une célèbre marque de sport estime que l’allure naturelle de confort chez un adulte en bonne santé est comprise en moyenne entre 03 et 05 km/heure, 03 km/heure étant la marche de promenade.

Mais alors ? Selon le Sergent Gaston Gras du Régiment d’Infanterie Coloniale du Maroc, à propos de l’assaut, par son régiment, sur le fort de Douaumont le 24 octobre 1916, le Commandement a prévu une progression de 100 mètres en 04 minutes, soit 25 mètres/minute, soit 1500 mètres/heure.

Vitesse de 01,5 km/heure !!! Alors, marche de promenade ? Assurément pas.

« En plus de l’équipement et des cartouchières, les fantassins portent deux masques à gaz, trois musettes pour les biscuits, le bœuf, et le chocolat, les grenades, deux bidons de deux litres pour le vin et l’eau, une couverture, une pelle-bêche, deux sacs à terre soit une charge de trente à trente-cinq kilos »

Source : livre « Douaumont, vérité et légende » page 92, de Alain Denizot, Editions Perrin


Le Sergent Gras, en 1929, nous gratifie de ce récit :

« … l’ horaire a prévu une avance de 100 mètres en quatre minutes, et c’est à peine si, en dix minutes, nous avons avancé de trente mètres, de trous en trous, dans une gangue infernale. La boue que nous ne connaissions alors qu’à moitié, qui jusque-là, se cantonnait sur nos chevilles, nous monte maintenant presque au genou : pour retirer sa jambe, il faut un effort indicible, comme pour arracher de terre une grosse betterave. »

« Pour l’attaque de Douaumont, nous partîmes équipés comme pour une revue, mais tous finirent par faire ce que je fis moi-même.

Lorsqu’on eut fait cent mètres en avant, lorsqu’on se rendit compte qu’on pouvait avancer, mais que la marche dans ce terrain pilonné présentait encore plus d’obstacles que la résistance de l’ennemi, chacun déboucla la courroie de son sac, et sans se préoccuper du linge et des vivres qu’il pouvait contenir, le laissa tomber avec un bruit flasque. » 

Source : livre « Douaumont 24 octobre 1916 », page 46 et 50, de Gaston Gras, Editions Lorraines-Frémont-Verdun.

L’assaut des fantassins pour la reconquête du fort de Douaumont est lancé à 11 heures 40, par temps de brouillard. A 14 heures 10, les soldats du RICM sont auprès du fort. A 16 heures 15, ils sont vus à l’avant de l’ouvrage.

Ce 24 octobre 1916, le Régiment d’Infanterie Coloniale du Maroc, à lui seul, déplore 07 officiers tués et 13 blessés, les hommes de troupes 104 tués et 377 blessés.

(source : www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr – Journal de Marche et Opérations du RICM – Cote 26 N 868/1 – Consulté le 15/05/2023).

Communiqué officiel : « Paris le 24 octobre 1916, 23 heures (….). Nos pertes sont faibles »

Source : livre « Douaumont 24 octobre 1916 », page 121 et 122, de Gaston Gras, Editions Lorraines-Frémont-Verdun.

Bilan issu des recherches du référent Histoire de l’Association Nationale des Anciens du RICM, aimablement communiqué : plus de 500 hommes hors de combat dont 09 officiers, 149 sous-officiers, gradés et marsouins tués ou morts de leurs blessures.

Ce 24 octobre 1916, la coordination dans l’action des régiments des 38ème et de 74ème Divisions d’Infanterie signe l’arrêt de la progression des troupes allemandes sur Verdun. Le RICM a rempli la mission qui lui était assignée : reprendre le fort de Douaumont. Pour ce haut fait d’armes, le drapeau du Régiment d’Infanterie Coloniale du Maroc est décoré de la Légion d’honneur.

Quant à mon arrière-grand-père, valeureux soldat servant au sein du 1er Bataillon, 3ème Compagnie de ce prestigieux régiment, il revient de cet assaut, blessé par éclat d’obus. 07 mois plus tard, il est de nouveau au combat sur le Chemin des Dames. Il prend part à l’offensive Nivelle du mois d’avril 1917. Sa famille ne le reverra plus. Depuis le 02 juin 1917, il repose parmi ses compagnons d’armes au cimetière militaire d’Oeuilly-sur-Aisne.

Photo issue de l’album familial de Thierry Ramoné

Pour nos lecteurs intéressés, bientôt le récit détaillé de cette journée du 24 octobre 1916 dans un article rédigé et confié par le référent Histoire de l’Association Nationale des Anciens du RICM. 

A connaître

La devise du RICM : « Recedit Immortalis Certamine Magno » – « Il revint immortel de la grande bataille ».

Le drapeau du RICM est l’emblème le plus décoré de l’armée française.

En 1956, par changement d’appellation, le Régiment d’Infanterie Coloniale du Maroc devient « Régiment d’Infanterie – Chars de Marine » .

Sur le revers, inscriptions :

  • La Marne 1914-1918 – Verdun-Douaumont 1916 – La Malmaison 1917 – Plessis de Roye 1918 – L’Aisne – L’Ailette 1918 – Champagne 1918 – Argonne 1918 – Maroc 1925-1926 – Toulon 1944 – Delle 1944 – Kehl 1945 – Indochine 1945-1954 – AFN 1952-1962.

Sur la cravate :

  • 1914-1918 : la Légion d’Honneur, la médaille militaire, la croix de guerre avec 10 palmes ;
  • 1939-1945 : la croix de guerre avec 2 palmes ;
  • T.O.E. : la croix de guerre avec 5 palmes ;
  • OPEX : croix de la valeur militaire avec deux palmes et une citation à l’ordre de la brigade ;
  • La croix de guerre de l’ordre Portugais de la Tour et de l’Epée ;
  • La cravate bleue de la « Distinguished Unit », inscription « Rosenau » ;
  • La croix de l’ordre du mérite chérifien.

(Sources : ministère des armées – Chemins de mémoire et l’Association Nationale des Anciens du RICM)

Cet article a été validé par le référent Histoire de l’Association Nationale des Anciens du RICM. 

Thierry Ramoné – GR189 – Délégué FNRG